Grand prix en 1983 - Société des Auteurs Compositeurs Dramatiques.
à Jean Françaix
Avec un nom comme le sien, et puisqu'on dit que personne n'est prophète en son pays, il est tout naturel que la gloire de Jean Françaix ait tout d'abord été une gloire européenne. Et, de fait, c'est outre-Rhin que, très tôt, cet éblouissant élève de la grande Nadia Boulanger a conquis ses premiers lauriers. Il incarnait en effet, avec une sorte de perfection, toutes les qualités que l'on se complaît à reconnaître à nos compatriotes. La grâce et l'humour, la clarté et la pudeur, la tendresse et l'intelligence, tout cela se retrouvait, bien avant la dernière guerre, dans des oeuvres qui constituaient déjà le plus exact et le plus flatteur des portraits que nous puissions souhaiter de notre propre héritage. (.......)
Peu importe que le style de Jean Françaix ne s'inscrive point dans les sentiers parfois tortueux de l'avant-garde : il est, il se veut le continuateur d'une lignée qui, après Debussy et Ravel, ne s'encombre point de partis-pris, et entend poursuivre sans tourner la tête une trajectoire lumineuse, réconfortante - et heureuse - je crois d'ailleurs que c'est là le mot qui définit le mieux le musique de Jean Françaix : le bonheur. Même lorsqu'il s'attaque à des sujets graves ou même austères, il réussit, selon son propre mot, à "faire de la musique sérieuse sans gravité". Il nous ouvre alors des horizons souvent profonds, parfois sévères, mais il réussit toujours, en même temps, à nous rassurer, et à préserver, au moment même où nous pourrions les mettre en doute, les raisons que nous avons de croire en la vie. C'est cela, une musique heureuse : c'est cela, le secret du bonheur que nous dispense à chaque instant la musique de Jean Françaix.
Pierre Petit, Compositeur.